Dans le cadre de la "MiSE À JOUR" de notre patrimoine
culturel, historique et religieux,
présentation des pages des Lectures de la bible
que l'Église propose traditionnellement en ce dimanche de l'année B .
Les commentaires destinés à en éclairer le sens sont du P. André REBRÉ, des Fils de la Charité,
tandis que les notes de la dernière page sont du rédacteur local, en l'absence d'indication,
C'est un même souffle prophétique qui anime les Préceptes du Décalogue et le récit des marchands chassés du Temple. Dans les deux cas, il est question de la fidélité à l’Alliance. Or l'idolâtrie menace toujours le coeur de l'homme.
En confondant commerce et religion, les contemporains de Jésus transforment le Temple en «Maison de trafic». Mais l'évangile de Jean se distingue des synoptiques en faisant remarquer que Jésus «parlait du Temple de son corps ».
Désormais, la maison de Dieu parmi les hommes n'est autre que le corps de Jésus, c'est-à-dire à la fois son humanité et le corps ecclésial que forment ses disciples.
Détruit par les hommes, puis relevé par Dieu, le corps deJésus révèle l’éminente dignité de tout être vivant. En lui éclate la folie de l'amour dont Dieu aime les hommes.
Tel est le vigoureux message de l'épître d'aujourd'hui.
1. Lecture du livre de l’Exode Ex 20, 1-17
La pratique du Décalogue est la réponse du peuple à l'initiative du Dieu qui libère.
Sur le Sinaï, Dieu prononça toutes les paroles (1) que voici : «Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays d'Egypte, de la maison d'esclavage. Tu n'auras pas d'autres dieux que moi.
[Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux, ou en bas sur la terre, ou dans les eaux par-dessous la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces images, pour leur rendre un culte.
« Car moi, le Seigneur ton Dieu, je suis un Dieu jaloux: chez ceux qui me haïssent, je punis la faute des pères sur les fils, jusqu'à la troisième et la quatrième génération; mais ceux qui m'aiment et observent mes commandements, je leur garde ma fidélité jusqu'à la millième génération.]
Tu n'invoqueras pas le nom du Seigneur ton Dieu pour le mal, car le Seigneur ne laissera pas impuni celui qui invoque son nom pour le mal.
- Tu feras du sabbat un mémorial, un jour sacré.
- [Pendant six jours tu travailleras et tu feras tout ton ouvrage; mais le septième jour est le jour du repos, sabbat en l'honneur du seigneur ton Dieu: tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni tes bêtes, ni l’immigré qui réside dans ta ville. Car en six jours le Seigneur a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qu’ils contiennent, mais il s'est reposé le septième jour. C'est pourquoi le Seigneur a béni le jour du sabbat et l'a consacré.
Honore ton père et ta mère afin d'avoir longue vie sur la terre que te donne le Seigneur ton Dieu.
Tu ne commettras pas de meurtre. (2) Tu ne commettras pas d'adultère.Tu ne commettras pas de vol.
Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain; tu ne convoiteras pas la fernrne de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son boeuf, nï rien de ce qui lui appartient.» (3)
Ces dix commandements sont LE CODE DE LA ROUTE d'un peuple sorti de l'esclavage et qui marche vers la liberté sous la conduite du Dieu libérateur. Ils ont pour but de garantir et de baliser cette marche en dénonçant les idoles qui asservissent l'homme et en rnettant en garde contre la tentation d'asservir son frère en lui volant sa femme, ses biens ou sa réputation.
Ce code peut nous paraître simpliste au regard de l'Évangile, mais peut-on prétendre vivre l'Évangile sans être d'abord fidèle à ces commandements ?
# Aimer, c'est avoir un amour exigeant pour celui que l'on aime. Comment concilions-nous amour et exigence dans notre tâche de parents, d'éducateurs, d'enseignants ou de catéchistes ?
2.Première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens Co 1, 22-25
Que Dieu se soit révéIé dans un crucifié prendra toujours les hommes à contre-pied de leurs idées sur Dieu et sur l'homme.
FRÈRES, alors que les juifs réclament les Signes du Messie (4), et que le monde grec recherche une sagesse> (5), nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les peuples païens (6). Mais pour ceux que Dieu appelle, qu'ils soient juifs ou Grecs, ce Messie est puissance de Dieu et sagesse de Dieu. Car la folie de Dieu est plus sage que l'homme, et la faiblesse de Dieu est plus forte que l'homme.
La réflexion des philosophes grecs sur Dieu et le sens aigu de la grandeur divine qu'avaient les Juifs sont certainement parmi les plus hauts sommets spirituels de l'Antiquité.
Cette recherche avait conduit le monde grec à la conception d'un Dieu rationnel, norme suprême de l'intelligence et de l'harmonie de l'univers, et le monde juif à celle d'un Dieu tout-autre, inaccessible, le Tout-Puissant créateur et maître de l'histoire.
Et qu'a fait Dieu? Il a planté la croix de son Fils en plein milieu de ce monde. Et qu'annoncent Paul et les apôtres? Que cet homme crucifié est l'ultime parole où Dieu se fait connaître et qu'en lui repose le salut du monde!
Et qu'est-ce que l'Église? Le groupe de ceux qui, devant cette folie de Dieu au regard des hommes sensés, ont abandonné toute assurance propre, toute prétention à se valoriser eux-mêmes pour croire que cette faiblesse infinie de Dieu est la force qui transformera le monde!
3. Évangile de Jésus Christ selon saint Jean jn 2, 13-25
C’est par un corps d'homme, celui de Jésus ressuscité, que Dieu se rend présent désormais à tous les hommes.
Comme la Pâque des juifs approchait, Jésus monta à Jérusalem. Il trouva installés dans le Temple les marchands de boeufs, de brebis et de colombes, et les changeurs. Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple ainsi que leurs brebis et leurs boeufs; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs, et dit aux marchands de colombes : «Enlevez cela d'ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. » (7)
Ses disciples se rappelèrent cette parole de l'Écriture :“L’amour de ta maison fera mon tourment”. Les juifs l'interpellèrent: «Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais là? » Jésus leur répondit: «Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverai. ».
Les juifs lui répliquèrent: « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce Temple, et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
Mais le Temple dont il parlait, c'était son corps.
Aussi, quand il ressuscita d'entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu'il avait dit cela; ils crurent aux prophéties de l'Écriture et à la parole que Jésus avait dite.
Pendant qu'il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque beaucoup crurent en lui, à la vue des signes qu'il accomplissait. Mais Jésus n'avait pas confiance en eux, parce qu'il les connaissait tous et n'avait besoin d'aucun témoignage sur l'homme : il connaissait par lui-même ce qu'il y a dans l'homme.
Les sacrifices d'animaux et les offrandes que faisaient au Temple de Jérusalem les nombreux pèlerins de la Pâque nécessitaient la présence des marchands et des changeurs qui envahissaient le parvis. Ce trafic, s'il prêtait parfois à des transactions malhonnêtes, était nécessaire. Pourquoi donc le geste violent de Jésus? En agissant ainsi, Jésus met fin, symboliquement, au privilège du peuple élu: désormais c'est le Christ ressuscité qui est le seul chemin vers Dieu, le seul Temple où l'on peut rencontrer Dieu.
Et ce nouveau Temple est universel, il n'est la propriété d'aucun peuple, d'aucune civilisation.
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NOTES
(1) - Le Décalogue, une loi fondamentale qui pose la double reconnaissance des droits de Dieu et des droits de l’homme, et affirme le caractère inséparable de ces deux aspects.
Le Décalogue
- Le Décalogue, c'est-à-dire les « dix paroles » (l'expression « dix commandements » ne figure pas dans la Bible), désigne
la liste des commandements présentés comme donnés par Dieu aux Hébreux dans le désert par l'intermédiaire de
Moise. Le texte en est écrit sur des blocs de pierre appelées « Tables de la Loi ».
Dieu parle à son peuple. C'est une des affirmations essentielles de notre foi.
Ces dix commandements sont des paroles de vie, comme des balises qui indiquent la route pour aller vers Dieu. Aussi est-il le fondement de la morale, et sans doute pas seulement de la juive et de la chrétienne.
(2) - La préférence donnée à la forme négative, à l'interdiction, relève d'une certaine sagesse: les limites aident à grandir.
(3) - De dix à un - Les dix commandements peuvent se résumer en deux thèmes: respect de Dieu et respect des autres.
Jésus les résumera en deux grands commandements: amour de Dieu et amour du prochain.
Et saint Jean les unifiera en rapportant le commandement de Jésus: « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » (15,12) Car il n'y a qu'une façon d'aimer Dieu, c'est d'aimer les autres.
L'avons-nous remarqué ? Jésus ne nous dit pas: « Aimez-moi comme je vous ai aimés » Il nous tourne vers l'amour du prochain.
(4)-« Les juifs réclament les signes du Messie »: Jésus s'était plaint de l'appétit de ses contemporains pour les signes spectaculaires et avait refusé d'y répondre (Mt 12, 38 ; 16, 1). De fait, les juifs attendaient des interventions divines en leur faveur, comme celles qu'ils avaient vues tout au long de leur histoire; comme celles qu'ils se remémorent chaque année pour la Pâque.
(5) « Le monde grec recherche une sagesse » : les Grecs cherchent Dieu par des moyens humains. Ils représentent les païens les plus cultivés, adeptes de philosophie, créateurs de systèmes, hommes du raisonnement.
(6)- « Nous proclamons un Messie crucifié »: cette affirmation a dû paraître, en son temps, d'une très grande audace !
Les crucifiés, à Jérusalem, étaient soit des « terroristes », soit des assassins (ou considérés comme tels ).
Paul refuse de partager l'attente des juifs, ses contemporains: un messie puissant qui triompherait des Romains, les occupants. Jésus a accepté la mort la plus redoutée, la plus méprisée, pour signifier, d'un signe extrême, que l'amour de son Père pour l'humanité allait « jusqu'au bout » de l'infinie tendresse.
(7) - Le culte, au Temple de Jérusalem
Dans le Temple de Jérusalem, coeur de la vie religieuse en Israël, étaient célébrées de nombreuses fêtes qui attiraient des foules de pèlerins venus non seulement de Palestine, mais des quatre coins du monde connu où les juifs étaient dispersés.
Outre la prière des psaumes, la visite au Temple comportait des offrandes d'animaux destinés à être sacrifiés: taureaux et béliers pour les plus riches, pigeons et colombes pour les petites bourses.
Naturellement, de nombreux marchands proposaient ces produits qu'ils étaient sûrs de vendre. Par ailleurs, pour ces acheteurs très cosmopolites, il fallait des changeurs de monnaie. Les uns et les autres finissaient par envahir l'espace même du Temple, et tout ce réseau de marchands, de marchandises et de marchandages finissaient par être autant d'obstacles à la rencontre avec le Seigneur.
D'où la colère de Jésus: « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ! »
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L’Indignation, une vertu ? :
Parmi les dynamismes qui assurent le progrès spirituel de l'humanité, on peut compter l’Indignation. Il peut paraître étrange d'en faire une vertu. Toute société a peur de ceux qui ne veulent pas supporter l'injustice, et qui clament cette volonté de ne pas supporter l'insupportable !
L'indignation est « un sentiment de colère soulevée par une action qui heurte la conscience morale ». Habituellement, il faut du courage pour oser exprimer son indignation, surtout si le forfait » est commis ou toléré par l'autorité en place. L'indignation est l'opposé de la courtisanerie.
Au cours de l'Histoire, les chrétiens ont trop généralement commis la faute grave de ne pas s'indigner (sauf un tout petit nombre) devant la guerre de terreur menée contre les Indiens, devant la traite des Noirs qui dura près de trois siècles, devant les pogroms de toutes sortes... Il y a des indignations nécessaires. Aujourd'hui, face à la famine, avons-nous une réaction suffisante de refus ?
L’indignation est le corollaire même de l'amour, comme le montre bien l'épisode de Jésus chassant les marchands du Temple. La colère du Christ n'a qu'une source : l'amour de son Père qui, pour Israël, habite le Temple.
Il peut y avoir ainsi un usage bon de l'agressivité, quand nous l'utilisons avec calme contre la haine, l'indifférence et la bêtise. La colère devient bonne quand, unie à une véritable charité, elle dénonce le mal,
Source : Le Semainier Chrétien, F-56120 GUEGON www.edmc.fr